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Photo du rédacteurAnne Quéméré

Confinement... quand tu nous tiens !


Mardi 17 mars 2020, tous les Français .e.s sont appelé.e.s à rester à la maison. Le confinement est officiellement annoncé par notre gouvernement. Les hashtags #restezchezvous , #jerestechezmoi , #confinementtotal , #covid19 fleurissent sur les réseaux. C’est la stupeur dans tous les foyers ! L’heure semble grave. Ce virus dévastateur, que beaucoup d'entre nous ont pris, jusqu'à ce jour avec une légèreté certaine, devient tout à coup l’ennemi public n°1, un combattant de l’ombre pernicieux et mortel qui s’abat et fait tousser notre pauvre monde déjà à bout de souffle.

Comme la majorité des Français.e.s, je me retrouve donc confinée. sans réaliser encore ce que la situation implique réellement. Résidant dans un petit hameau à la pointe du Finistère, je file jusqu’à la ville la plus proche effectuer quelques achats. Sans céder à la panique générale, je contemple ahurie les nombreux rayons délestés de leurs marchandises et découvre au détour des allées des visages masqués aux regards brumeux. Ma première pensée est que le monde est en train de devenir fou. La seconde est qu’il est hors de question que je me laisse gagner par cette atmosphère anxiogène. Pourtant quelque chose a déjà changé en moi. Le matin même, pour la première fois, j’ai rédigé une liste de courses. Jamais jusqu’à présent je n’avais accompli pareille chose, jamais il ne m’était venu à l’idée d’anticiper les menus de toute une semaine, exception faite lors de mes navigations au long cours, en solitaire, lorsque je devais embarquer mon avitaillement pour deux ou trois mois. Mais cette fois, je ne prends pas la mer… Je reste à terre, isolée dans mon bout du monde.

Les premiers jours passent à la vitesse de l’éclair. J’entreprends mille et un projets que je remettais sans cesse au lendemain. Je m’active, dépoussière la maison de la cave au grenier, range, nettoie, astique et brique… Jusqu’à ce que chaque recoin de mon penty resplendisse comme un sou neuf ! Ayant le privilège d’avoir un petit jardin et de profiter d’une météo clémente, ce qui ne nous était pas arrivé dans le Cap Sizun depuis l’automne, je tonds la pelouse, taille les haies, plante, déplante, replante et vais même jusqu’à repeindre le mur du jardin… Une couche, deux couches, trois couches… J’épuise mes derniers pots de peinture. Mon petit mouchoir de poche n’avait jamais reçu autant d’attention, il n’a désormais plus rien à envier aux jardins de Versailles.

Vient alors le temps de se poser, d’écouter les oiseaux gazouiller, d’observer la Nature qui se fiche bien de la tragédie humaine qui se joue... Nous n’en sommes alors qu’au huitième jour de confinement sur les quinze annoncés initialement et je comprends alors, en lorgnant les nouvelles sur les réseaux, que celui-ci va jouer les prolongations et certainement se renforcer. Ma famille et mes amis avec lesquels je suis en lien téléphonique beaucoup plus régulièrement qu’auparavant confirment mes inquiétudes. Nous ne sommes pas encore entrés dans le vif du sujet, le pic de la pandémie est attendu bientôt… Dans les prochains jours ? Les prochaines semaines ? Impossible d’en connaître la date exacte, cette catastrophe planétaire est bien trop complexe pour se contenter de statistiques aussi arbitraires que hasardeuses. Il va falloir user de patience et accepter le fait qu’ici bas, on ne contrôle plus grand chose. Pendant ce temps, les scientifiques du monde entier sont à pied d’œuvre, les gouvernements s’empêtrent dans des directives que certains citoyen.ne.s prennent un malin plaisir à enfreindre tandis que le personnel hospitalier, corvéable à merci et doté de moyens pitoyables, se donne sans compter. Les réseaux fourmillent de bons conseils, d’infox, de divagations diverses où chacun vomit son fiel, émet un avis, écrit ses angoisses, partage ses extravagances. Le citoyen ne sait plus à quel Saint se vouer, les rumeurs enflamment les esprits, le bon sens n’est plus de rigueur. Notre humeur passe par toutes les nuances de gris.

Arrive le neuvième jour de confinement... Il est encore tôt le matin lorsque le tintement de la cloche du jardin déclenche les aboiements furieux de mes compagnons à quatre pattes. Qui peut bien venir jusqu’à chez moi en ce moment et à une heure aussi matinale ? Ce n’est que mon voisin. Il est ligneur professionnel. Il rentre de mer et la criée d’Audierne étant fermée, il me crie à distance : « J’ai du poisson pêché tout frais ce matin, j’ai décidé de l’offrir à qui veut dans le hameau ! Je t’en dépose deux ? ». Et comme par magie, deux superbes lieus atterrissent sur mon muret de pierre. J’ai envie de courir embrasser mon généreux donateur, mais le moment ne s’y prête pas et je dois me contenter de le remercier. Quelques mots prononcés qui me paraissent bien fades face à ce cadeau immense. L’idée d’un délicieux déjeuner me fait bien-sûr saliver, mais ce qui me touche plus profondément, c’est le geste. Un geste qui dénote une belle générosité et qui, à l’heure où chacun.e se terre chez lui empli.e du sentiment étrange de devenir insignifiant.e, presque transparent.e, redonne du baume au cœur.

Ainsi naissent ou se renforcent de véritables amitiés...

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3 Comments


Eric Pollet
Eric Pollet
May 02, 2020

Bonjour un peu plus de compassion avec le personnel soignants serai bien , encore une personne qui ne pense que elle , grrr c'est fou on dirait qu'il n'y a pas de virus qui circule , je ne vous souhaite pas d'avoir un membre de votre famille atteint - vous verrez on change vite d'avis - mais il est vrai vous êtes médecin est vous savez quoi faire , bref j'ai pas de mots

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Jackline Thoral
Jackline Thoral
Mar 28, 2020

merci Anne de ton amitié contagieuse qui mériterait d'être remboursée par la sécu ,en cette période ce confinement national..

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Francis Benveniste
Mar 28, 2020

Bien senti, Anne. Passe a l'ombre et prends soin des tiens. Je t'embrasse. De loin ! M'autorises-tu a partager ton post sur mon mur FB ?

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